Le goût du Salento : souvenirs d’enfance et trésors cachés
Il y a des lieux qui ne sont pas juste des destinations, mais des morceaux de soi. Pour moi, c’est le Salento, au cœur des Pouilles, cette péninsule dorée entre deux mers. Mon père y est né. J’y retourne chaque été, portée par les racines, les odeurs, les saveurs.
Mais oubliez les cartes postales. Je vous parle d’un Salento intime, celui qu’on goûte plus qu’on ne visite, celui qui se vit au rythme des souvenirs et des parfums de cuisine, comme une madeleine de Proust.
Le matin : focaccia, pain chaud et criques secrètes
Tout commence à l’aube. Mon père revient du four du village, les bras chargés de focaccia et de petits pains croustillants, transformés en panini pour le déjeuner. Dans un sac de plage, ils attendront leur heure, celle où l’on s’installe, en famille, sur les plages au sable blanc et à l’eau turquoise que l’on appelle désormais — avec raison — les Maldives du Salento.
À l’époque, ces plages n’avaient pas de surnom exotique. C’étaient juste nos plages, sauvages, calmes, parfois difficiles à trouver. Aujourd’hui, elles sont prisées, photographiées, géolocalisées. Mais je connais d’autres criques, plus secrètes, où l’on peut encore savourer un sandwich au capocollo les pieds dans l’eau, dans un silence que seule la mer vient troubler.
Dolcetti & café glacé : mon duo bonheur
Rien ne me ramène plus à l’enfance que ces dolcetti aux amandes, aujourd’hui dégustés avec un caffè leccese – café noir, glaçons, lait d’amande. Le meilleur se boit à une table bancale sur une placette, sous des stores à rayures, entouré de voix en dialecte. Le serveur vous connaît. Les anciens vous saluent d’un “Buuona seeeeraaa” qui chante encore comme une berceuse.
La vie au ralenti : simplicité et authenticité
Dans le Salento, le temps s’étire. On prend le petit-déjeuner au bar du coin, debout au comptoir, avec un cappuccino et un cornetto fourré de crème ou de Nutella. On pique-nique à la plage ou, pour les plus aventureux, sur un petit bateau, le nez au vent, à plonger dans des criques désertes.
Et le soir, comme tout le monde n’a pas une nonna pour cuisiner les plats contadini, ces recettes paysannes transmises à l’oral, simples et pleines d’âme, on a une solution : les agriturismi, ces auberges rurales nichées entre les oliviers. On y mange ce que la terre donne : légumes du jardin, fromages faits sur place, viandes locales.
Et puisque je parle de fromage : mon oncle a une fromagerie. Les vaches sont du coin, les produits aussi. Rien d’industriel ici, juste du lait, du savoir-faire, et de la passion.
Goûts d’été et marchés de bord de route
Le Salento, c’est aussi les figues de Barbarie cueillies au bord du chemin, les pastèques vendues sur des camions, les pêches juteuses, les légumes sous huile à déguster avec des friselle. Et ce petit geste précis pour les humidifier… Seul un Italien saura vous expliquer la technique.
Entre oliviers et dîners en amoureux
Ce pays est simple, mais sait se faire romantique. Un dîner les pieds dans l’eau, dans une crique cachée, à savourer du poisson grillé dans une grotte naturelle… c’est aussi ça, le Salento. Une douceur. Une élégance sans ostentation.
Transmission
Il y a une photo de moi à Alberobello, petite, en robe à fleurs, devant un trullo avec mon petit frère, un petit jouet qui tourne au grès du vent dans la main. Aujourd’hui, ce village est envahi de touristes et d’objectifs Instagram. Mais l’authenticité, elle se cache ailleurs. Dans les villages oubliés, dans les gestes simples, dans les repas pris sous une tonnelle en vigne.
Mon père a quitté sa terre, mais il ne l’a jamais vraiment quittée. Il nous l’a transmise, par ses plats, par ses souvenirs, par ses silences aussi. Ce pays, c’est un héritage du cœur.
Et les pâtes alors ?
Vous vous demandez pourquoi je n’ai pas parlé de pâtes, pizzas, glaces ? Parce qu’évidemment, elles sont délicieuses. Comme partout en Italie. Mais ce n’est pas ça, que je veux vous faire découvrir.
Je veux vous parler du terroir, de la lenteur, de la culture paysanne, de la richesse du Salento, cette région qui fut jadis grecque, avant de redevenir italienne. Un territoire de métissages, de traditions, de chaleur humaine.
Ici, la cuisine raconte l’histoire. Et cette histoire, j’ai envie de vous la faire vivre car si j’ai choisi de devenir travel planner, c’est aussi pour offrir ça à ceux qui veulent voyager autrement — pas en suivant les itinéraires des guides, mais ceux dictés par le ventre, les souvenirs, les émotions.